vivons heureux

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(vivons heureux en arpentant la rue)

dimanche 1 juin 2014

Sixième séance : au château















... Et soudain, la rue des rêves devient galerie des glaces, les plafonds s'ornent de lustres à lames de cristal, l'arrière-boutique est transformée en salle des gardes et, par les fenêtres, les jardins, les fontaines se succèdent.

Nous avons profité d'une excursion au château de Versailles (agrémentée d'une visite sur la vie quotidienne qui s'est révélée très réussie), pour imaginer nos commerçants en souverains, régnant sur un domaine devenu somptueux. Que se passe-il quand ce qui fait la vie de tous les jours prend des allures royales ? Comment la projection dans le temps, l'utilisation de ce qu'on vient de voir et d'apprendre métamorphosent-elles ce qui, jusqu'ici, pouvait se résumer à quatre murs, une caisse enregistreuse, des étagères, un comptoir et des marchandises ? Qu'en est-il lorsque son personnage est brusquement flanqué de serviteurs et d'une cour à ses ordres ? Sa façon de voir le monde, ses rêves en sont-ils modifiés ?

J'ai tout d'abord demandé aux élèves de décrire le parcours qu'ils venaient d'effectuer dans le château, afin qu'ils s'imprègnent des lieux, se rappellent la visite guidée en détail (nous avons mené l'atelier en partie à Versailles). Je leur ai lu également des extraits d'un roman de Frédéric Richaud, Monsieur le jardinier, consacré à La Quintinie, jardinier du roi, expert en fruits et légumes, ami des savants et aimé de Louis XIV, qui lui pardonnait son absence d'empressement et venait même parfois travailler avec lui.

Ensuite, revenus à Poissy, ils ont projeté les habitants de la rue des rêves dans un château réinventé...


*




















La Quintinie pouvait rester des jours entiers dans son champ sans paraître à la cour. Et lorsque ses détracteurs l'apercevaient dans un couloir du palais, ils raillaient volontiers son allure peu raffinée. Son pas énergique contrastait avec la lenteur de ses bras et de ses mains. « Ce monsieur devrait s'attacher les services d'un maître de danse. » Il passait en tenue de travail, tête nue, les chausses, les bas et les souliers boueux. « ... Joignez-y, mon cher, ceux d'un maître tailleur... » Devant les grands du royaume, il parlait peu et l'on sentait qu'il n'attendait que le moment où il pourrait enfin rejoindre son jardin. « ... Et ceux d'un maître de rhétorique. »
 
Mais dès que le jardinier regagnait son potager, son pas s'élargissait, ses gestes se faisaient harmonieux et précis. Il connaissait chaque plante, chaque insecte par son nom. Nombreux étaient ceux qui venaient discuter avec lui le soir, à l'heure où les ombres s'étirent, s'enrichir de sa connaissance des saisons, des légumes et des fruits, de sa sagesse toute simple qu'il avait héritée du monde qu'il gouvernait.




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